Le SEPAFAR (Service Pastoral pour la formation et l’Accompagnement des Responsables) a initié un panel sur la laïcité au Burkina Faso. C’est dans la chapelle Bethléem de la Cathédrale notre Dame de l’Immaculée Conception de OUAGADOUGOU que le SEPAFAR a animé son panel sur le thème : «la laïcité au Burkina Faso : perception, enjeux et défis pour la construction d’un État moderne harmonieux». Ce 21 novembre 2021, c’est avec un public composé des représentants de la communauté musulmane, protestante et celle de la religion traditionnelle que le panel a été animé.
Étaient présents au présidium, le Dr Abdoulaye SAWADOGO, enseignant (sociologue) chercheur à l’université Pr Joseph Ki-ZERBO, Dr Inoussa Compaoré iman et enseignant à l’université de Ouahigouya, l’Abbé Achille OUEDROGO, Professeur en droit et jurisprudence ecclésiastique. On note également la présence de Osée Gaétan Possy-Berry QUENUM (modérateur), directeur général de RAYNAL assurance.
Les trois panelistes ont d’entrée de jeu reconnu que le mot laïcité revêt un caractère multidimensionnel (un mot qui a plusieurs définitions). Mais tous s’accordent à souligner la nécessité de comprendre la laïcité dans le sens d’une nécessaire séparation claire et nette entre l’État et les religions. La constitution burkinabè mentionne le caractère laïc du pays mais ne donne pas une définition précise du concept de la laïcité. « L’article 31 évoque le caractère laïc du Burkina Faso mais le contenu n’est pas clarifié », a fait remarquer le Dr Abdoulaye SAWADOGO. « Le concept de la laïcité n’est pas explicite au Burkina Faso », a renchéri l’Abbé Achille OUEDROGO.
Pour l’imam Inoussa SAWADOGO, le Burkina Faso doit trouver une définition précise à la laïcité. «Le Burkina Faso doit trouver sa propre laïcité c’est-à-dire une laïcité à la Burkinabè », explique-t-il. Pour lui, le modèle actuel de la laïcité est une importation de l’extérieur. Le Burkina Faso doit donc se baser sur son passé et ses propres réalités pour trouver et définir sa propre laïcité.
Par la suite, les trois panelistes ont également noté certains manquements au Burkina Faso en termes de laïcité. «Il y a un déséquilibre en termes de neutralité et d’impartialité entre l’État et les religions», explique M. SAWADOGO. Pour lui, il est difficile pour l’État d’être neutre entre les religions à cause du lien entre le pouvoir, l’économie et la religion. Il ajoute aussi que l’État privilégie les religions révélées notamment le catholicisme.
L’imam COMPAORE a de son côté relevé les injustices dans les congés scolaires (congés de Noël et congé de Pâques) et les jours fériés qui sont en faveur des chrétiens. Il note cependant que l’État a fait des efforts pour gommer ces inégalités en changeant ne serait-ce que les dénominations des congés qui sont devenus maintenant des ‘‘congés trimestriels’’.
Pour conclure, tous les panelistes ont porté la remarque judicieuse selon laquelle la laïcité doit être un facteur de construction démocratique. «L’État n’a pas de mécréants ni d’apostats, l’État n’a que des citoyens (…). «La laïcité doit être un ami et non un ennemi (comme c’est le cas en France) des religions», explique l’Abbé OUEDROGO. Selon lui, le deuxième nom de la laïcité c’est le ‘‘Faso d’abord’’. «la laïcité est une question d’éducation car on ne nait pas laïc, on n’est éduqué à le devenir», a-t-il conclu.
Le Dr Abdoulaye SAWADOGO a évoqué la notion du fidèle laïc qui est un exemple de bon croyant vivant sa foi et qui utilise les valeurs de sa foi pour être un modèle de bon citoyen dans la société. Pour lui, la diversité des religions au Burkina Faso doit être une richesse pour le bon vivre- ensemble et non un obstacle. « L’État doit jouer son rôle de garant et d’équilibre entre les religions pour éviter certains dérapages» a-t-il conclu.
En rappel, le SEPAFAR est le Service Pastoral pour la formation et l’Accompagnement des responsables. Il organise régulièrement des conférences sur des thèmes fondés sur la doctrine sociale de l’Église. Sa mission est de rendre témoignage de la foi au Christ, compagnon d'Emmaüs et d’être vraiment le sel de la terre et la lumière du monde.
C'est un cadre de réflexion, de concertation et d'action pour tous ceux et toutes celles qui participent aux prises de décisions, surtout dans les domaines de l'administration publique, du législatif, de l'exécutif, dans les domaines du secteur privé, des mouvements et associations.