LA NÉVROSE DE POSSÉDER
32ème dimanche du Temps Ordinaire – Année B
En ce temps-là, dans son enseignement, Jésus disait : « Méfiez-vous des scribes, qui tiennent à se promener en vêtements d’apparat et qui aiment les salutations sur les places publiques,
les sièges d’honneur dans les synagogues, et les places d’honneur dans les dîners.
Ils dévorent les biens des veuves et, pour l’apparence, ils font de longues prières : ils seront d’autant plus sévèrement jugés. »
Jésus s’était assis dans le Temple en face de la salle du trésor, et regardait comment la foule y mettait de l’argent. Beaucoup de riches y mettaient de grosses sommes.
Une pauvre veuve s’avança et mit deux petites pièces de monnaie.
Jésus appela ses disciples et leur déclara : « Amen, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis dans le Trésor plus que tous les autres.
Car tous, ils ont pris sur leur superflu, mais elle, elle a pris sur son indigence : elle a mis tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre. » (Marc 12,38-44)
Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris
L'une des contributions les plus précieuses de l'Évangile à l'homme contemporain est de l'aider à vivre avec un sens plus humain au milieu d'une société malade de la "névrose de possession".
Le modèle de société et de coexistence qui façonne notre vie quotidienne se fonde non pas sur ce que chaque personne est, mais sur ce que chaque personne a. L'important est d'"avoir". L'important est "d'avoir" de l'argent, du prestige, du pouvoir, de l'autorité.... Celui qui possède ces choses prend de l'avance et réussit dans la vie. Celui qui n'obtient aucune de ces choses est disqualifié.
Dès leur plus jeune âge, les enfants sont éduqués davantage pour "avoir" que pour "être". Ce qui compte, c'est qu'ils soient formés pour que demain ils "aient" un poste, un revenu, un nom, une sécurité. Ainsi, presque inconsciemment, nous préparons les nouvelles générations à la compétition et à la rivalité.
Nous vivons dans un modèle de société qui appauvrit facilement les personnes. La demande d'affection, de tendresse et d'amitié qui bat en chaque être humain est satisfaite avec des objets. La communication est remplacée par la possession d'objets.
Les gens s'habituent à se valoriser par ce qu'ils possèdent. Et, de cette manière, ils risquent de se rendre incapables d'amour, de tendresse, de service généreux, d'aide solidaire, de sens gratuit de la vie. Cette société ne nous aide pas à grandir dans l'amitié, la solidarité et le souci des droits des autres.
C'est pourquoi l'invitation de Jésus à valoriser la personne en fonction de sa capacité de service et de solidarité prend une importance particulière à notre époque. La grandeur d'une vie ne se mesure finalement pas à la connaissance que l'on possède, ni aux biens que l'on a réussi à accumuler, ni au succès que l'on a pu atteindre, mais à la capacité de servir et d'aider les autres à vivre d'une manière plus humaine.
Combien de personnes humbles, comme la veuve de l'Évangile, contribuent davantage à l'humanisation de notre société par leur vie simple de solidarité et d'aide généreuse aux nécessiteux que de nombreux personnages de la vie sociale, politique ou religieuse, habiles défenseurs de leurs intérêts, de leur renommée et de leur position.
Auteur : José Antonio Pagola
Traducteur : Carlos Orduna, csv