Homélie de Monseigneur Philippe OUEDRAOGO lors de l'ordination épiscopale de Monseigneur Médard Léopold OUEDRAOGO à Cathédrale de l’Immaculée Conception de Ouagadougou, le 11 Août 2012 à 9h

Frères et sœurs en Christ et en humanité,

La grâce et la paix de Notre Seigneur Jésus Christ soient toujours avec vous !

Je ne vous apprends rien en vous confiant que je ressens une émotion particulière, ce matin, au moment où il m’est donné d’ordonner Evêque Auxiliaire Mgr Médard Léopold OUEDRAOGO pour le service de notre Eglise Famille de Dieu.

L’émotion qui est la mienne, à n’en point douter, est partagée par chacun de vous.

Léopold n’est pas un étranger dans notre archidiocèse et dans l’Eglise Famille de Dieu du Burkina Faso. Il va recevoir sous vos yeux l’ordination épiscopale. Et c’est là une opportunité qui mérite que nous mettions en exergue la vie et le ministère de l’Evêque dans l’Eglise.

RÔLE ET MINISTERE DE L’EVÊQUE

Dans sa constitution dogmatique sur l’Eglise, le Concile Œcuménique Vatican II nous enseigne que, durant son pèlerinage sur cette terre, le Seigneur Jésus annonça l’Evangile du Royaume et l’inaugura en sa personne, révélant son mystère à tous les hommes (Cf. Lumen Gentium, n°3). Il appela des hommes et des femmes à le suivre, et parmi ses disciples, il en choisit douze, pour qu’ils « soient avec lui ». (Mc 3,14). Il les constitua « Sous la forme d’un collège, c’est-à-dire d’un groupe stable, à la tête duquel il mit Pierre, choisi parmi eux » (cf. Pontifical Romain, homélie).C’est un acte d’amour, voulu librement par Jésus, en union profonde avec le Père et avec l’Esprit Saint.

- L’effusion spéciale de l’Esprit Saint, dont les Apôtres furent comblés par le Seigneur ressuscité, fut par eux, transmise à leurs collaborateurs et successeurs par le geste de l’imposition des mains (1Tim. 4,14) et la consécration épiscopale qui confèrent la plénitude du sacrement de l’Ordre, le Sacerdoce suprême, la totalité du ministère sacré. Ainsi, par l’intermédiaire des Evêques et des prêtres qui les assistent, le Seigneur Jésus-Christ continue d'être présent au milieu des croyants. C’est le Pape, successeur de St Pierre, qui garantit la pérennité de la succession apostolique, et confère licéité et validité à toute ordination épiscopale. En dehors de l’autorité pontificale, aucune légitimité ne saurait être reconnue à toute ordination ou investiture épiscopale. Au début de la présente célébration, la présentation et la lecture de la Bulle Pontificale constitue un mandat apostolique qui confère toute la légitimité de l’ordination épiscopale qui nous réunit ce matin.

Frères et sœurs, certains pourraient se demander : « Pourquoi un évêque auxiliaire à Ouagadougou ? »

La législation canonique stipule que : « Quand les besoins pastoraux du diocèse le demandent, un ou plusieurs Evêques auxiliaires seront constitués à la requête de l’Evêque diocésain. L’Evêque auxiliaire ne jouit pas du droit de succession » (Canon 403,1).

Comme vous le savez, nombreuses et pressantes sont les besoins pastoraux dans l’Archidiocèse de Ouagadougou qui compte près de 2.600.000 habitants dont près de 800.000 baptisés. 1/3 de la population connaît Jésus. C’est un diocèse cosmopolite où toutes les ethnies du Burkina Faso sont représentées.

C’est donc, pour faire face aux multiples et complexes besoins pastoraux que l’Archevêque a sollicité au Saint Père la nomination d’un évêque Auxiliaire pour le service de la mission évangélisatrice de l’Eglise. A ce propos, dans son exhortation apostolique post-synodale « Africae munus », le Pape Benoît XVI donne un ordre de mission, une feuille de route à ses frères africains dans l’épiscopat :

« Votre premier devoir est de porter à tous la Bonne Nouvelle du salut, dit-il, et de donner aux fidèles une catéchèse qui contribue à une connaissance plus approfondie de Jésus-Christ. Veillez à donner aux laïcs une vraie conscience de leur mission ecclésiale, et incitez-les à la réaliser avec le sens des responsabilités, envisageant toujours le bien commun. Les programmes de formation permanente des laïcs, en particulier pour les leaders politiques et économiques, devront insister sur la conversion comme condition nécessaire pour transformer le monde » (Africae munus, n°103).

En outre, au seuil du 3ème millénaire, à la suite du Christ, le Bienheureux Pape Jean-Paul II invitait tous les successeurs des Apôtres à partir résolument en mission sur les routes du monde : « Duc in altum » (Lc 5,4). A la lumière de cette invitation pressante du Seigneur, nous pouvons relire le triple « munus » que l’Eglise confie aux évêques : « Munus docendi, sanctificandi et regendi », i.e la triple fonction d’enseignement, de sanctification et de gouvernement.

Duc in docendo : Allez au large dans le devoir d’enseigner, de proclamer la Parole à temps et à contretemps ; comme le dit si bien St Paul à Timothée : « réfute, menace, exhorte, avec une patience inlassable et le souci d’instruire » (2Tim. 4,2).

Duc in sanctificando : Allez au large dans la mission de sanctification. Les filets que les Apôtres sont appelés à jeter parmi les hommes sont avant tout les sacrements, notamment le sacrifice eucharistique quotidien ; ils forment une sorte de filet salvifique, qui libère du mal et conduit à la plénitude de la vie.

Duc in regendo : Allez au large dans la mission de gouverner. Comme pasteurs et vrais pères, assistés par les prêtres et les autres collaborateurs, les évêques ont la mission de rassembler et d’animer toute la grande famille de leur troupeau, en sorte que tous vivent et agissent dans une communion de charité.

Ce sont là des conditions pour servir l’Evangile du salut en Jésus-Christ pour l’espérance du monde. (cf. Pastores gregis, n°5).

LA VIE DE L’EVÊQUE

Bien cher Léopold, sans être à votre place, on peut deviner aisément quelques facettes des sentiments qui vous habitent. Tout évêque, nouvellement nommé, passe par là. Nul doute que vous vous êtes sérieusement demandé, à maintes reprises, « pourquoi moi » ?

La première lecture de notre célébration nous renvoie à des exemples bibliques qui pourraient vous inspirer et vous rassurer : Abraham, Isaac, Jacob, Moïse… Tous ont éprouvé l’irruption soudaine dans leur vie d’un Dieu aimant, fidèle à ses promesses et qui invite à l’engagement pour la construction d’un monde juste. L’appel de Moïse est symbolisé par le buisson ardent qui flambe sans se consumer.

- Avec confiance et espérance, le Seigneur, par son Eglise, vous confie la responsabilité et la charge épiscopale. Ayez confiance et abandonnez-vous à la volonté divine.

L’épiscopat n’est pas un honneur ou une promotion mais une tâche, un service.

Le Seigneur vous appelle et vous confie un service d’amour (Officium Amoris), selon l’expression de St Augustin. Aimez donc votre Eglise Famille de Dieu telle qu’elle est, avec ses beautés et ses défis déconcertant. Vivez et annoncez l’Evangile avec générosité et audace. Soyez pour tous un Père et un maître de foi. Soyez un modèle pour votre troupeau et un coopérateur désintéressé, humble et généreux pour votre archevêque et pour vos confrères prêtres, diocésains et religieux, réunis en Presbyterium unifié et fraternel.

Puissiez-vous réaliser pleinement votre devise épiscopale : « Vous êtes le sel de la terre ».

Dans la 2ème lecture (1 Tm 4, 12-16), à l’instar de Timothée, Saint Paul invite tout épiscope à être un bon serviteur de Jésus Christ : « Sois un modèle pour les croyants, en parole, en conduite, en charité, en foi, en pureté ! »

Avec le Bienheureux Pape Jean-Paul II, ensemble, retenons que, par-dessus tout, « la perspective dans laquelle doit se placer tout le cheminement pastoral est celle de la sainteté, i.e. l’accueil enthousiaste et généreux pour mettre à la première place la vocation à la sainteté... En effet, la transformation ontologique accomplie par la consécration épiscopale, comme configuration au Christ, requiert un style de vie qui manifeste la charité pastorale. (Cf. Novo Millenio Ineunte, n°30)

- C’est surtout dans l’exercice de son ministère, en imitant la charité du Bon Pasteur, que l’évêque est appelé à se sanctifier et à sanctifier, en ayant comme principe unificateur la contemplation du visage du Christ et l’annonce de l’Evangile du salut (Cf. . Pastores gregis, n°11).

- En outre, cher frère dans l’épiscopat, « la sainteté à laquelle l’Evêque est appelé exige l’exercice des vertus, en premier lieu des vertus théologales (Foi, Espérance, Charité) et celui des conseils évangéliques de chasteté, pauvreté, obéissance.

- La sainteté personnelle de l’évêque doit rejaillir sur ceux qui ont été confiés à sa sollicitude pastorale, et qu’il doit servir. Le Pape Benoît XVI exprime cela de façon saisissante lorsqu’il déclare : « Votre vie de prière irriguera de l’intérieur votre apostolat. Un évêque doit être un amoureux passionné du Christ » (Cf. Africae munus, n°100).

En résumé, c’est précisément la vie spirituelle de l’évêque qui favorise la fécondité de son action pastorale.

Frères et sœurs, chers agents pastoraux, chers prêtres, religieux et religieuses, catéchistes, responsables laïcs... accueillez avec joie et reconnaissance, comme un don précieux de Dieu, Mgr Médard Léopold OUEDRAOGO.

- Rappelez-vous les paroles du Christ aux Apôtres :

« Qui vous écoute, m’écoute ; qui vous rejette me rejette. Et celui qui me rejette, rejette celui qui m’a envoyé ». (Mat 10, 40). Réservez donc à votre Evêque Auxiliaire une hospitalité bienveillante, un respect et une collaboration franche comme ministre du Christ, intendant des mystères de Dieu, défenseur et Père des pauvres, des faibles, des veuves et orphelins, artisan intrépide de justice et de paix.

Frères et sœurs, priez pour votre évêque Auxiliaire et votre Archevêque, car c’est le devoir de tous les fidèles de prier pour leurs évêques. Priez pour qu’à la suite du Christ, ils soient de bons pasteurs, de bons bergers, des serviteurs zélés, capables de donner leur vie, jusqu’à mourir, pour le troupeau qui leur est confié. Puissions-nous être des reflets de Jésus Christ, des apôtres passionnés pour l’annonce de la Bonne Nouvelle.

- Demandons à la Bienheureuse Vierge Marie dont nous célèbrerons bientôt l’Assomption, d’intercéder aujourd’hui et toujours pour notre Eglise Famille diocésaine, de veiller et de protéger maternellement le ministère de Mgr Médard Léopold et de rendre fécond le travail missionnaire de tous les agents pastoraux pour la gloire de Dieu et le salut du monde !

A M E N !

+Monseigneur Philippe OUEDRAOGO
Archevêque Métropolitain de Ouagadougou