Pèlerinage national au Sanctuaire Notre Dame de Yagma, Dimanche 1er février 2015

Frères et sœurs, ma joie est grande de participer avec vous à ce pèlerinage national  sur la colline de Notre-Dame de Yagma. Vous êtes venus si nombreux manifester votre amour à la Vierge Marie, la Mère de Jésus et notre Mère à tous ! Avec vous, je lui confie les intentions de votre pays et celles de chacune de vos familles. Qu’elle demeure proche de chacun et de chacune d’entre vous et vous guide vers son fils Jésus, sur les chemins de la paix et de la fraternité !

« Tais-toi ! sors de cet homme ! » dit Jésus à l’esprit impur. Et nous voyons combien Jésus parle avec autorité. « Voilà un enseignement nouveau donné avec autorité » (v. 27), disaient les gens en l’entendant et en voyant ce qu’il venait de faire. Ce passage de l’Évangile s’adresse aussi à nous aujourd’hui ; à nous personnellement, à nos communautés chrétiennes, mais aussi à nos sociétés humaines, et en particulier à votre société burkinabè.

Que veut donc nous dire Jésus ? Il nous appelle d’abord à convertir nos cœurs. Il est venu pour faire sortir de nous les esprits mauvais, c'est-à-dire tout ce qui nous empêche de marcher à sa suite ; tout ce qui nous empêche de suivre son enseignement. C’est un appel à la conversion personnelle qui nous est lancé. Chacun de nous y est invité. Personne ne peut dire qu’il en est dispensé ! Cette conversion de notre cœur n’est jamais achevée. Elle est sans cesse à reprendre. Et nous avons besoin que la parole de Jésus agisse au plus profond de nous-mêmes ; qu’elle nous aide à chercher et à trouver les démons qui nous habitent, pour qu’il nous en libère, et que notre vie soit toujours plus conforme à l’Évangile.

Vous le savez, le Pape François insiste beaucoup sur le thème de la fraternité. Aujourd’hui encore, malheureusement, la grande famille humaine se trouve si souvent divisée. N’est-ce pas là l’un des démons qui agitent notre monde, le démon de la division ? Nous en voyons hélas tous les jours les tristes conséquences un peu partout, et en particulier sur ce grand et beau continent. Mais rien n’est perdu nous dit l’Évangile ! Dieu notre Père nous a envoyé son Fils Unique, le nouvel Adam, pour constituer la racine d’une humanité renouvelée et réconciliée. Dieu nous adopte comme des enfants bien-aimés, nous dit saint Paul (cf. Ga 4, 5). Nous ne sommes plus esclaves de nos passions ni de nos convoitises, mais nous sommes devenus des fils, des héritiers du Royaume. Et cela est déjà une magnifique réalité ! Sommes-nous vraiment conscients que Dieu nous aime ? qu’il nous aime vraiment, chacun et chacune de nous, comme ses enfants bien-aimés ?

Voilà une certitude qui doit désormais transformer concrètement notre vie, nos comportements, nos relations avec les autres. Et nous devons commencer à vivre de cet amour dans nos familles, dans nos communautés chrétiennes. C’est pour nous une grande espérance de savoir que, par la grâce de Dieu, depuis notre baptême, nous avons déjà dans nos cœurs un germe de vie nouvelle. Déjà, avec Jésus-Christ et en lui, nos communautés chrétiennes sont la famille de Dieu. L’Église famille de Dieu ! une famille de frères et de sœurs, une famille de personnes réconciliées, qui vivent la véritable fraternité.

Et cette fraternité nous est donnée par Dieu, qui nous donne sa grâce, sa force. Mais il nous revient, à chacun, à chacune d’entre nous, de prendre notre part, de faire en sorte que cette fraternité devienne une réalité ; de faire en sorte que nous ayons entre nous des relations authentiquement fraternelles ; que toute notre vie rayonne de la joie de l’Évangile. Rayonner de la joie de l’Évangile ! Le Saint-Père François en parle souvent ! Nous devons ressentir ce que disait l’écrivain français Gide : le plus grave scandale des chrétiens est leur tristesse ! Nos communautés chrétiennes doivent rayonner de cette joie de nous retrouver ensemble comme des frères et des sœurs, enfants d’un même Père. C’est notre façon de témoigner efficacement du Seigneur ressuscité dans nos sociétés humaines. Sommes-nous heureux d’être chrétiens, d’être des frères et des sœurs enfants d’un même Père ?

Notre monde d’aujourd’hui a tellement besoin d’entendre ce message de fraternité, cette parole prophétique qui s’adresse à toute l’humanité (cf. Dt 18, 15). L’unité de la famille des enfants de Dieu, réunie autour du Christ, est le signe et doit être le ferment d’une fraternité plus large. Une fraternité qui doit s’étendre aux dimensions de toute la famille humaine, afin que les peuples connaissent, autant qu’il est possible ici bas, des jours paisibles et prospères, des jours de paix et de réconciliation.

A ce titre, frères et sœurs, vous savez combien il est important que la voix de l’Évangile se fasse entendre autour de vous, aujourd’hui, alors que votre pays connaît d’importantes transformations institutionnelles. Chacun et chacune d’entre vous, par son baptême, a reçu la mission d’annoncer l’Évangile parmi ses proches, dans son milieu de vie et dans le cadre de ses activités. Vos communautés chrétiennes ont un rôle déterminant à jouer dans la construction de la société burkinabè de demain. A la suite de Jésus, vous devez être des artisans de réconciliation, de justice et de paix. C’est d’ailleurs, très heureusement, le thème de ce pèlerinage que nous faisons aujourd’hui, ici, en ce lieu béni, à Notre-Dame de Yagma, à qui le Burkina-Faso a été consacré par le Pape Jean-Paul II il y a tout juste 25 ans. Et nous pouvons vraiment demander à la Mère de Jésus de vous soutenir dans vos engagements et dans votre témoignage de chrétiens, en ces temps décisifs.

Je pense en particulier aux personnes qui sont responsables de la gestion des affaires publiques, mais aussi à vous tous, dans toutes vos activités et dans vos relations sociales les plus ordinaires. N’ayez pas peur d’affirmer votre identité de disciples de Jésus-Christ ; notamment en refusant toute compromission avec les pratiques de ce monde qui ne sont pas compatibles avec l’Évangile. Je pense en particulier – mais pas seulement – à la pratique des vertus familiales ; la stabilité et l’unité des familles sont très importantes pour le développement harmonieux d’un peuple. Or la famille, telle qu’elle a été voulue par Dieu, est très contestée aujourd’hui ; le Saint-Père le rappelait avec force il y a quelques jours en Asie. Défendez vos familles, chers amis, défendez courageusement la famille ! et témoignez que votre vie en famille vous rend heureux. Je pense aussi au refus de la corruption et du gain facile. La recherche effrénée des biens matériels, des premières places et des honneurs, au détriment des biens spirituels, est un piège pour les enfants de Dieu que nous sommes. Ce sont des illusions qui ne rendent pas l’homme heureux. N’oubliez jamais que vous êtes le « pays des hommes intègres ». Sachez donc résister aux tentations du monde et préférez toujours la justice et l’équité, même si c’est difficile, même s’il en coûte, … et le reste vous sera donné par surcroit. Développez en vos cœurs, et transmettez autour de vous, l’esprit de don de soi, l’esprit de service du bien commun, afin de chasser les démons de l’orgueil, de la cupidité et de l’égoïsme qui ruinent les relations entre les hommes.

Enfin, ayez toujours à cœur d’instaurer un dialogue authentique avec toutes les personnes que vous rencontrez, en particulier avec celles qui appartiennent à d’autres religions. Vous pourrez établir des relations cordiales et bienveillantes, pour le bien commun de tous. Redoublez de générosité et de dévouement envers les plus démunis, sans faire aucune distinction. C’est le plus beau témoignage que vous rendrez au Christ ressuscité.

Frères et Sœurs, c’est comme cela que vous construirez la société à venir sur les fondements solides que le Seigneur nous donne dans son Évangile. Et ainsi, nous avons confiance que votre pays connaîtra des jours de justice et de paix. Cette grâce, aujourd’hui, nous voulons la demander. Chacun, lorsqu’il va en pèlerinage, demande au Seigneur une grâce particulière, pour soi et pour ses proches. Aujourd’hui, tous ensemble, nous voudrions que de nos cœurs monte cette prière : Seigneur, donne un avenir de justice et de paix au Burkina Faso. Donne paix et justice au continent Africain tout entier. Plus jamais de guerre fratricide, plus jamais de larmes sur le visage de nos enfants ! Nous en faisons la demande à Notre-Dame de Yagma. Ce pèlerinage national auquel vous êtes venus participer si nombreux est l’expression magnifique de la foi et de l’espérance de votre peuple. Puisse cette famille de Dieu au Burkina Faso s’agrandir encore. Puissiez-vous persévérer toujours sur cette voie de la piété, de la prière, de la confiance que vous mettez en Dieu, et vos attentes ne seront pas déçues. Que Notre-Dame de Yagma vous conduise tous à son fils, et vous donne la grâce de l’écouter et la force de le suivre !

Wênd na ning-y fâa barka, la a fâag-y zânga ne sui-tâan bêdsê. Wên’na sik wakat bùud fâa nônglem la laafi kùuni n kô Burkina Faso.

(Que Dieu vous bénisse tous, et vous épargne des embûches du démon. Que Dieu envoie toujours au Burkina Faso la grâce de l’amour et de la paix).

Monseigneur Angelo BECCIU,
Substitut de la Secrétairerie d’Etat du Saint Siège

Photo : http://www.egliseduburkina.org

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