Dans ce chapitre, nous allons répondre à trois questions qui nous sont souvent posées par nos frères chrétiens d’autres confessions :

* Pourquoi les catholiques disent-ils que Marie est restée toujours Vierge ?

* Pourquoi disent-ils que Marie est l’Immaculée Conception, c’est-à-dire qu'elle est née et a vécu “ sans péché ?

* Pourquoi disent-ils que Marie est entrée au ciel en corps et en âme ? Il s'agit donc d'expliquer le sens profond de ces trois mystères : la Virginité de Marie, son Immaculée Conception et son Assomption. Ce n'est pas une tâche facile, mais essayons quand même.

1. La virginité de Marie

La conception virginale de Jésus par Marie

La Virginité de Marie lors de la conception de Jésus est clairement affirmée par la Bible : “ Voici quelle fut l'origine de Jésus. Sa mère, Marie, avait été donnée en mariage à Joseph, mais avant qu’ils ne vivent ensemble, elle se trouva enceinte par une intervention de l'Esprit Saint ” (Mt 1, 18).

Dans Luc 1, 30 nous lisons : “ L'Ange lui dit : ‘Ne crains pas. Marie ! Tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Tu vas être enceinte et tu mettras au monde un fils.’ Marie dit à l'ange : ‘Comment cela se fera-t-il puisque je n'ai pas de relations avec un homme ?’ Mais l’ange répondit : ‘L’Esprit Saint viendra sur toi, la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre... C’est pourquoi le saint enfant qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu’” (Lc 1, 35).

Dans ces textes il est précisé que l'enfant naîtra sans l'intervention de Joseph : celui qui va naître de Marie est le même qui déjà est en Dieu, né de Dieu, Fils du Père (voir Jn 1, 1). L’ange utilise aussi l’image de l’ombre. La Bible parle souvent de l’ombre ou de la nuée qui remplissait le temple (1 R 8; 10), signe de la présence divine qui couvrait et protégeait la Ville sainte (Si 24, 4).

 

En employant cette image, l’Évangile indique que Marie devient la demeure de Dieu. L’Esprit Saint, vient, non pas sur le Fils, mais d'abord sur Marie : elle concevra par l'Esprit Saint, sans intervention humaine. La conception de Jésus en Marie est une conséquence et l'expression, sur le plan biologique, de cet acte de foi, unique dans l'histoire, par lequel elle a reçu sans réserve la Parole unique et éternelle du Père.

L'évangéliste Luc utilise le mot vierge deux fois. Pourquoi ne dit-il pas : “ une jeune fille " ou “ une jeune femme ” ? C'est pour faire écho aux prophètes qui affirmaient que Dieu serait accueilli par la “ Vierge d'Israël ". Pendant des siècles, Dieu avait enduré les infidélités de son peuple et lui avait pardonné ses péchés. Mais lorsqu'Il est venu à nous, le Dieu Sauveur voulait être accueilli par un peuple vierge, un peuple qui soit neuf et tout à Lui. Au temps de Jésus, à la lecture de la prophétie d'Isaïe 7, 14, beaucoup pensaient déjà que le Messie naîtrait d'une mère vierge. Et l'Évangile nous dit : Marie est la “ vierge ” qui donne jour au Messie.

Il fallait que soit vierge celle qui, dès le début, avait été choisie par Dieu pour accueillir son Fils dans un acte de foi parfaite. Celle qui allait donner à Jésus son sang, ses traits héréditaires, son caractère, sa première formation, devait avoir grandi à l'ombre du Tout-puissant, ayant fait de toute sa vie un don sans réserve au Dieu vivant.

Avant la visite de l’ange, Marie se proposait-elle de demeurer vierge ?

L'Évangile ne donne aucune autre précision que la parole de Marie : “ Comment cela se fera-t-il puisque je ne connais pas d'homme ? ” (Lc 1, 34), ce qui dans la Bible signifie : “ Je n'ai pas de relations avec un homme ".

Rappelons que Marie avait été donnée en mariage à Joseph (Lc 1, 27) et que, selon la Loi juive, les fiançailles donnaient déjà tous les droits de la vie conjugale, même s'ils ne vivaient pas encore sous le même toit (Mt 1, 20).

Dans ces conditions, la question de Marie : “ Comment aurai-je un enfant puisque je n'ai pas de relations avec un homme " (Lc 1, 14) n'aurait aucun sens si Marie n'était pas décidée à rester vierge pour toujours. Marie était l'épouse légitime de Joseph. Si ce couple voulait avoir des relations conjugales normales, l’annonce de l'ange concernant la maternité de Marie ne pouvait lui poser aucun problème. Cependant, Marie manifeste sa difficulté.

Cette question de Marie semble indiquer qu'elle se proposait de demeurer vierge. Une telle décision semble surprenante chez une jeune fille juive, car la mentalité d'Israël mettait au premier plan la fécondité et n’accordait pas de valeur religieuse à la virginité. Pour Joseph cependant, accepter cette situation n'était pas chose impensable. Car à cette époque, chez les Juifs, certains Esséniens vivaient le célibat, attendant ainsi l’imminente arrivée du Messie. D'autre part, le célibat ou la virginité à vie n'était pas possible aux femmes. Selon la coutume juive, une femme appartenait nécessairement a un homme soit à son père, soit à son mari, soit à son fils aîné si elle était veuve. Marie était donc déjà la femme de Joseph et elle ne pouvait pas refuser cet engagement matrimonial imposé, même si elle voulait garder la virginité. C'est pourquoi elle avait accepté cet engagement de rester vierge en accord avec Joseph.

Nous pouvons conclure que ce texte biblique paraît favorable à la volonté de Marie de rester vierge.

Marie est-elle restée vierge après la naissance de Jésus ?

Nous lisons dans l’Évangile : “ Joseph ne connut pas Marie jusqu'à ce qu’elle ait mis au monde son fils ” (Mt 1, 25). N'est-ce pas dire qu'il eut des relations avec elle après la naissance de Jésus ? Par ailleurs nous lisons : “ Marie mit au monde son fils premier-né ” (Lc 2, 7). N'est-ce pas dire que Marie eut d'autres enfants ?

À notre avis, ces deux textes ne sont pas la preuve que Marie et Joseph ont eu des relations conjugales après la naissance de Jésus, ni que Marie a eu d'autres enfants.

Matthieu veut seulement dire : Marie était vierge quand Jésus est né. Mais il ne veut pas dire qu'après elle n'est pas restée vierge. De même, quand Luc emploie l’expression “ fils premier-né " il ne veut pas dire qu'après Jésus, Marie eut d'autres enfants, car, chez les Juifs, même un fils unique était appelé “ fils premier-né". En effet, ce titre signifiait que le garçon était, de droit, consacré à Dieu. Ce que Marie fera 40 jours après la naissance de Jésus (Lc 2, 22-23).

D'après une tradition qui remonte au début de l'Église, nous croyons que Marie est restée vierge avant la visite de l'ange, pendant la conception de Jésus et après la naissance de Jésus, mais l’Évangile n'est pas explicite sur ce point. Cependant, comment penser qu’après avoir été ainsi aimée, visitée par Dieu pour qu’en elle se réalise son alliance définitive avec l’humanité, elle ait pu se replier sur un amour humain, et se donner à un autre, cet autre fût-il Joseph, parfait serviteur de Dieu ? Il est vrai que l'Évangile parle des “ frères de Jésus ” (Mc 3, 31), mais nous avons déjà expliqué ce point au chapitre 7.

Considération finale

Marie n'exprime pas les motifs de son choix de la virginité, mais tout ce que Luc laisse entrevoir dans l'âme de Marie suppose qu’elle avait des motifs élevés. Par l’intermédiaire de l'ange, elle est traitée par Dieu comme “ Aimée de Dieu ", “ Comblée de grâce ", “ Le Seigneur est avec elle". Et Marie veut être sa “ servante ” exprimant ainsi sa disponibilité pour que naisse d'elle celui qui est à la fois “ le serviteur ” annoncé par les prophètes (Is 42, l ; 50, 1 ; 52, 13) et “ le Fils " (He 1).

La virginité de Marie semble ainsi une consécration, un don d’amour exclusif au Seigneur. Avec le “ oui “ de l’Annonciation : “ Que tout se passe pour moi selon ta Parole ", Marie se consacre totalement et exclusivement au plan de Dieu.

Martin Luther affirme en 1546 que Marie est vierge avant de concevoir Jésus et qu'elle l’est après la naissance de Jésus. Les premiers Réformateurs, à la suite de Luther et de Zwingli, croyaient en la virginité perpétuelle de Marie, alors que beaucoup de Protestants, aujourd’hui n’y croient plus. Pourquoi ?

Pour réfléchir

1. Que pensaient Luther et les premiers Réformateurs au sujet de la virginité de Marie ?

2. Que pensent aujourd’hui la plupart des protestants au sujet de la virginité de Marie ?

3. Comment s’est réalisée la conception de Jésus ?

4. Comment fut annoncée la venue du Messie ?

5. Quelles prophéties se sont accomplies en Marie ?

6. Quel sens donnait Marie à sa virginité ?

7. Pourquoi s'est-elle engagée dans le mariage alors qu’elle se proposait de ne pas avoir d'enfants ?

8. Jusqu'à quel point Marie s'est-elle soumise au plan de Dieu ?

9. Comment faut-il interpréter Matthieu 1, 25 et Luc 2,7 ?

10. Comment faut-il interpréter les textes qui parlent des “frères de Jésus " ?

2. Comment comprendre l'Immaculée Conception de Marie ?

Saint Paul dit : “ Tous ont péché et sont privés de la présence glorieuse de Dieu " (Rm 3, 23). Pourtant, selon la foi catholique, Marie, la mère de Jésus, en vertu d'une grâce exceptionnelle, n'a jamais connu le mal, ayant été conçue sans être marquée par le péché originel. C’est cette immunité absolue qui est appelée “ Immaculée Conception". Au-delà du caractère en quelque sorte négatif de cette définition, ce que l'Église entend affirmer c'est l’exceptionnelle sainteté de Marie, qui n'a jamais refusé à Dieu la plus petite preuve d'amour.

Cette foi s’appuie sur une très ancienne tradition de l'Église, qui trouve elle-même son fondement dans la salutation de l’archange Gabriel à Marie : " Salut, pleine de grâce ” (Lc 1, 28).

Nous appelons “ grâce ” ce pouvoir que Dieu a pour guérir notre esprit, pour le disposer à croire, et pour que le geste d’amour vrai naisse spontanément de nous. Nous appelons “ grâce ” tout ce qui a son origine dans le Dieu vivant, mais doit germer sur notre terre (cf. Is 45, 8 ; Ps 85, 11). Marie est vraiment “ pleine de grâce " et Dieu l'a préservée du péché dès l'instant de sa conception. Jésus qui est sans péché ne pouvait pas naître d'une femme qui aurait été souillée par la tache du péché.

Un problème théologique

Les chrétiens ont toujours cru en la parfaite pureté de Marie, la “ toute sainte ”‘, mais le titre d'Immaculée Conception leur posait un problème insoluble : Jésus est le Sauveur de toute l’humanité, dont fait partie Marie ; mais si Marie est toute sainte dès l'instant de sa conception, comment Jésus peut-il être son Sauveur ? Ni saint Bernard, ni saint Thomas d'Aquin, ni saint Bonaventure ne surent résoudre cette apparente contradiction. C'est le théologien anglais Duns Scot (XIIIe siècle) qui réussit à expliquer clairement la question, en reconnaissant à Marie le bénéfice d’une Rédemption anticipée, préservatrice, de la part de son Fils.

L’Immaculée Conception, vérité de foi

En 1854, le Pape Pie IX, en reprenant l’explication de Duns Scot proclama le dogme de l’Immaculée Conception. Par cette déclaration solennelle, cette croyance de tous les chrétiens à travers le monde devint une “ vérité de foi ”.

Quatre ans plus tard, par un concours frappant de circonstances, cette définition allait recevoir, aux yeux du monde catholique, une étonnante confirmation : une fillette illettrée de 14 ans, totalement ignorante du vocabulaire théologique, allait en effet voir la Vierge lui apparaître et se présenter à elle comme étant “ l'Immaculée Conception ” : c'était à Lourdes (France) en 1858 et la fillette s'appelait Bernadette Soubirous. Marie approuvait ainsi la foi des chrétiens en son Immaculée Conception.

Le sens de l’Immaculée Conception

Par le dogme de l'Immaculée Conception, l'Église nous propose de contempler en Marie la parfaite réussite de l’humanité telle qu'elle est voulue par Dieu. Notre modèle est Marie, une jeune fille qui a dit oui une fois pour toutes à Dieu, qui est restée fidèle à sa Parole et n'a jamais cessé d'avoir foi en son Fils.

3. Le sens de l'Assomption de Marie

Le 1er novembre 1950, le Pape Pie XII, après avoir consulté les évêques du monde entier, proclama le dogme de l'Assomption de Marie avec ces mots : “ ...Nous affirmons, nous déclarons et nous définissons comme un dogme divinement révélé que l'Immaculée Mère de Dieu, Marie toujours vierge, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, a été élevée en corps et en âme à la gloire céleste ”.

Les chrétiens d'Orient préfèrent parler de la “ Dormition de la Vierge ” et les catholiques de l’“ Assomption de Marie ". La Bible ne dit rien sur cette “ élévation ” de Marie au ciel, mais le souvenir de ce mystère est passé dans la Tradition de l'Église.

Il y a certains textes “ apocryphes ” (non acceptés comme Écriture Sainte par l'Église) qui parlent déjà de l'Assomption, situant l’événement entre 3 et 50 ans après la mort et la résurrection du Christ.

C'est saint Grégoire de Tours, au VIe siècle, qui fait la première formulation théologique au sujet de l’Assomption de Marie.

Voici la conviction de l'Église : puisque le corps du Christ a été formé du corps de Marie, il est normal que le corps de Marie partage la gloire du corps du Christ ressuscité sans connaître la décomposition du tombeau. Parce qu'elle a été sa Mère, Marie a été très unie à Jésus, le Sauveur de tous les hommes. Alors, il convenait qu’après sa vie sur la terre, Marie jouisse du fruit complet de la rédemption, en entrant dans la gloire du Christ ressuscité avec son âme, mais aussi avec son corps, c’est-à-dire sa personne tout entière.

En Matthieu 27, 52-53, nous lisons qu'à la mort de Jésus : “ les tombeaux s'ouvrirent, les corps de nombreux saints qui étaient morts ressuscitèrent et, sortant des tombeaux après sa Résurrection, ils entrèrent dans la ville sainte et apparurent à plusieurs personnes ”.

Ce paragraphe veut dire, en style d'apocalypse, que la mort de Jésus marque l’arrivée du salut définitif. Le Christ ressuscité a rejoint, d'une façon mystérieuse mais réelle, ces multitudes historiques ou préhistoriques qui devaient l'attendre pour entrer dans la vie même de Dieu.

Si cette résurrection-glorification de certains justes de l’Ancien Testament a eu lieu dès l'instant où Jésus nous a sauvés par sa mort sur la croix, alors il est vraisemblable que le Seigneur ait accordé cette même faveur à Marie, sa mère.

Nous croyons avec Paul à la résurrection générale : “ Tous ressusciteront à cause de leur union au Christ, mais chacun à son propre rang : le Christ en premier lieu puis ceux qui lui appartiennent, au moment où il viendra ” (1 Co 15, 23). Mais à la suite de chrétiens des temps immémoriaux, nous croyons que cette résurrection a déjà eu lieu pour Marie, la mère du Christ. Et l’entrée de Marie ressuscitée dans la gloire du Christ, premier-né d’entre les morts, est le signe et le gage de notre propre résurrection.

 

Père Carlos Orduna Diez
Clerc de Saint Viateur
1999

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