BONHEUR

6ème dimanche du Temps ordinaire – Année C

 

Jésus descendit de la montagne avec eux et s’arrêta sur un terrain plat. Il y avait là un grand nombre de ses disciples et une grande multitude de gens venus de toute la Judée, de Jérusalem, et du littoral de Tyr et de Sidon.
Et Jésus, levant les yeux sur ses disciples, déclara : « Heureux, vous les pauvres, car le royaume de Dieu est à vous.
Heureux, vous qui avez faim maintenant, car vous serez rassasiés. Heureux, vous qui pleurez maintenant, car vous rirez.
Heureux êtes-vous quand les hommes vous haïssent et vous excluent, quand ils insultent et rejettent votre nom comme méprisable, à cause du Fils de l’homme.
Ce jour-là, réjouissez-vous, tressaillez de joie, car alors votre récompense est grande dans le ciel ; c’est ainsi, en effet, que leurs pères traitaient les prophètes.
Mais quel malheur pour vous, les riches, car vous avez votre consolation !
Quel malheur pour vous qui êtes repus maintenant, car vous aurez faim ! Quel malheur pour vous qui riez maintenant, car vous serez dans le deuil et vous pleurerez !
Quel malheur pour vous lorsque tous les hommes disent du bien de vous ! C’est ainsi, en effet, que leurs pères traitaient les faux prophètes. » (Lc 6,17. 20-26)

Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris

 

On peut lire et entendre de plus en plus fréquemment des nouvelles optimistes sur la résolution de la crise et sur la reprise progressive de l’économie.

On nous dit que nous assistons déjà à une croissance économique; mais croissance de quoi ? Croissance pour qui ? Nous sommes à peine informés sur toute la vérité de ce qui arrive.

La reprise économique en cours est en train de consolider, voire perpétuer, ce qu’on appelle la "société duale". Un fossé de plus en plus profond s’ouvre entre ceux qui vont pouvoir améliorer leur niveau de vie avec de plus en plus de sécurité et ceux qui vont être laissés pour compte, sans travail ni avenir dans cette vaste opération économique.

En fait, la consommation ostentatoire et provocatrice des plus riches et la misère et l’insécurité des plus démunis, augmentent simultanément.

La parabole du riche "vêtu de pourpre et de lin qui se festoyait magnifiquement tous les jours" et du pauvre Lazare, qui cherchait sans succès à se rassasier de ce qui tombait de la table du riche, est une dure réalité dans notre société duale.

Il y a parmi nous, une série de "mécanismes économiques, financiers et sociaux" dénoncés par Jean-Paul II, "qui, bien que maniés par la volonté des hommes, fonctionnaient presque automatiquement, rendant plus rigides les situations de richesse des uns et de pauvreté des autres”.

"Une fois de plus, nous sommes en train de consolider une société profondément inégalitaire et injuste. " Dans cette encyclique éclairée et évangélique qu'est Sollicitudo rei socialis, si peu écoutée, même par ceux qui font constamment l’éloge de son auteur, Jean-Paul II découvre à la racine de cette situation ce qui n'a qu'un seul nom : le péché.

Nous pouvons donner toute sorte d’explications techniques, mais lorsque le résultat constaté est l’enrichissement toujours plus grand des plus riches et la chute des plus pauvres, c’est le manque de solidarité et de justice qui est en train de s’y consolider

Dans ses Béatitudes, Jésus avertit qu'un jour le sort des riches et celui des pauvres sera inversé. Il est facile de trouver, aujourd'hui aussi, de nombreuses personnes qui, à la suite de Nietzsche, pensent que cette attitude de Jésus est le résultat du ressentiment et de l'impuissance de celui qui, incapable d'obtenir plus de justice, demande la vengeance de Dieu.

Cependant, le message de Jésus n'est pas né de l'impuissance d'un homme vaincu et plein de ressentiment, mais de sa vision intense de la justice de Dieu qui ne peut permettre le triomphe final de l'injustice.

Vingt siècles se sont écoulés, mais la parole de Jésus continue d'être décisive aussi bien pour les riches que pour les pauvres. Une parole de dénonciation pour les uns et de promesse pour les autres qui est toujours vivante et qui nous interpelle tous.

Auteur : José Antonio Pagola
Traducteur : Carlos Orduna, csv

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