RETROUVER LA GRATITUDE

28ème dimanche du Temps Ordinaire – Année C

En ce temps-là, Jésus, marchant vers Jérusalem, traversait la région située entre la Samarie et la Galilée.
Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre. Ils s’arrêtèrent à distance
et lui crièrent : « Jésus, maître, prends pitié de nous. »
À cette vue, Jésus leur dit : « Allez vous montrer aux prêtres. » En cours de route, ils furent purifiés.
L’un d’eux, voyant qu’il était guéri, revint sur ses pas, en glorifiant Dieu à pleine voix.
Il se jeta face contre terre aux pieds de Jésus en lui rendant grâce. Or, c’était un Samaritain.
Alors Jésus prit la parole en disant : « Tous les dix n’ont-ils pas été purifiés ? Les neuf autres, où sont-ils ?
Il ne s’est trouvé parmi eux que cet étranger pour revenir sur ses pas et rendre gloire à Dieu ! »
Jésus lui dit : « Relève-toi et va : ta foi t’a sauvé. »  (Lc 17,11-19)

Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris

 

Il a été dit que la gratitude disparaît du "paysage affectif" de la vie moderne. Le célèbre essayiste José Antonio Marina rappelait récemment que l'héritage de Nietzsche, Freud et Marx nous a plongés dans une "culture du soupçon" qui rend la gratitude difficile.

On se méfie du geste fait par pure générosité. Selon le professeur, "c'est devenu un dogme de foi que personne ne donne rien gratuitement et que toute intention apparemment bonne cache une imposture". Il est alors facile de considérer la gratitude comme "un sentiment propre aux imbéciles, aux égarés ou aux esclaves".

Je ne sais pas si cette attitude est si répandue. Mais il est vrai que, dans notre "civilisation mercantile", il y a de moins en moins de place pour ce qui est gratuit. Tout est échangé, prêté, dû ou exigé. Dans ce climat social, la gratitude disparaît. Chacun reçoit ce qu'il mérite, ce qu'il a gagné par ses propres efforts. On ne donne rien à personne gratuitement.

Quelque chose de semblable peut arriver dans notre relation avec Dieu si la religion devient une sorte de contrat avec lui : "Je t'offre des prières et des sacrifices et tu m'assures de ta protection. Je fais ce qui est prescrit et tu me donnes la récompense.? La louange et l'action de grâce à Dieu, source et origine de tout bien, disparaissent ainsi de l'expérience religieuse.

Pour de nombreux croyants, retrouver la gratitude peut être la première étape pour guérir dans leur relation avec Dieu. Cette louange reconnaissante ne consiste pas principalement à le louer ou à énumérer les dons reçus. La première chose à faire est de saisir la grandeur et la bonté insondable de Dieu; prendre conscience que nous ne pouvons vivre devant lui qu'en rendant grâce. Cette gratitude radicale envers Dieu engendre en nous une nouvelle façon de nous regarder, d'entrer en relation avec les choses et avec les autres personnes.

Le croyant reconnaissant sait que son existence toute entière est un don de Dieu. Les choses qui l'entourent prennent alors une profondeur inconnue auparavant ; elles ne sont pas seulement là comme des objets pour satisfaire des besoins, elles sont des signes de la grâce et de la bonté du Créateur. Les personnes qu'il rencontre sur son chemin sont aussi un don et une grâce ; à travers elles, la présence invisible de Dieu lui est offerte.

Parmi les dix lépreux guéris par Jésus, un seul revient " en glorifiant Dieu ", et lui seul entend les paroles de Jésus : " Ta foi t'a guéri ". La reconnaissance et la louange joyeuses de Dieu sont toujours une source de salut.

 

Auteur : José Antonio Pagola
Traducteur : Carlos Orduna, csv

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