LE MAÎTRE INTÉRIEUR

16ème dimanche du Temps Ordinaire – Année C

En ce temps-là, Jésus entra dans un village. Une femme nommée Marthe le reçut.
Elle avait une sœur appelée Marie qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
Quant à Marthe, elle était accaparée par les multiples occupations du service. Elle intervint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur m’ait laissé faire seule le service ? Dis-lui donc de m’aider. »
Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses.
Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée. » (Lc 10,38-42)

Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris

 

Alors que la hiérarchie catholique insiste sur la nécessité du "magistère ecclésiastique" pour instruire et guider les fidèles, des secteurs importants de chrétiens orientent aujourd'hui leur vie sans tenir compte de ses directives. Jusqu'où ce phénomène peut-il nous mener ? La question devient de plus en plus inquiétante.

Certains théologiens pensent qu'il est nécessaire de retrouver la conscience du "magistère intérieur", si oublié chez les chrétiens. On dit ceci : à quoi bon insister sur le " magistère hiérarchique " si nous, croyants - hiérarchie et fidèles - n'écoutons pas la voix du Christ, notre " Maître intérieur " qui continue à instruire par son Esprit ceux qui veulent vraiment le suivre.

La vision du Christ comme "maître intérieur" provient de Jésus lui-même : "N'appelez personne votre maître, car un seul est votre maître, le Christ" (Matthieu 23, 10). Mais c'est surtout saint Augustin qui l'a introduite dans la théologie avec force en affirmant son importance : "Nous n'avons qu'un seul Maître. Et sous lui, nous sommes tous des disciples. Ce n'est pas parce que nous vous parlons du haut d'une chaire que nous sommes devenus des maîtres. Le vrai maître parle de l'intérieur".

La théologie contemporaine insiste sur cette vérité trop souvent oubliée par tous, hiérarchie et fidèles : les paroles prononcées dans l'Église ne sont qu'une invitation à ce que chaque croyant entende la voix du Christ en lui-même. C'est ce qui est décisif. Ce n'est que lorsqu’on adopte l'enseignement du Christ lui-même que "quelque chose de nouveau" se produit dans la vie d'un croyant.

Cela comporte plusieurs exigences. Tout d'abord pour ceux qui parlent avec autorité au sein de l'Église. Ils ne sont pas les propriétaires de la foi et de la morale chrétiennes. Leur mission n'est pas celle de juger et de condamner les personnes. Et encore moins de mettre sur les épaules des autres "des fardeaux lourds et insupportables". Ils ne sont les maîtres de personne. Ils sont des disciples qui doivent, eux aussi, vivre en "apprenant" du Christ. Ce n'est qu'alors qu'ils pourront aider les autres à "se laisser enseigner" par lui.

C'est ainsi que saint Augustin interpelle les prédicateurs : "Pourquoi aimez-vous tant parler et si peu écouter ? Celui qui enseigne vraiment est à l'intérieur ; mais lorsque tu essaies d'enseigner, tu sors de toi-même et tu marches à l'extérieur. Écoute d'abord celui qui parle dans ton intérieur, puis, de ton intérieur parle à ceux qui sont à l'extérieur".

Par ailleurs, nous devons tous nous rappeler que l'important, lorsque nous entendons la parole du magistère, est de nous sentir invités à nous tourner vers l'intérieur pour écouter la voix de l'unique Maître. Saint Augustin nous rappelle également : "Ne marche pas à l'extérieur. Ne t'éparpille pas. Entre à l'intérieur de toi-même car la vérité réside dans l'homme intérieur". La scène dans laquelle Jésus loue l'attitude de Marie qui "s'est assise aux pieds du Seigneur pour écouter sa parole", une attitude qui donne à réfléchir. Les paroles de Jésus sont claires : " Une seule chose est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part".

 

Auteur : José Antonio Pagola
Traducteur : Carlos Orduna, csv

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