Un texte du V° siècle sur la prière à méditer ...

Le bien suprême, c’est la prière, l’entretien familier avec Dieu. Elle est communication avec Dieu et union avec lui. De même que les yeux du corps sont éclairés quand ils voient la lumière, ainsi l’âme tendue vers Dieu est illuminée par son inexprimable lumière.

La prière n’est donc pas l’effet d’une attitude extérieure, mais elle vient du cœur. Elle ne se limite pas à des heures où à des moments déterminés, mais elle déploie son activité sans relâche nuit et jour.

En effet, il ne convient pas seulement que la pensée se porte rapidement vers Dieu lorsqu’elle s’applique à la prière ; il faut aussi, même lorsqu’elle est absorbée par d’autres occupations – comme le soin des pauvres ou d’autres soucis de bienfaisance –, y mêler le désir et le souvenir de Dieu, afin que tout demeure comme une nourriture très savoureuse, assaisonnée par l’amour de Dieu, à offrir au Seigneur de l’univers. Et nous pouvons en retirer un grand avantage, tout au long de notre vie, si nous y consacrons une bonne part de notre temps. La prière est la lumière de l’âme, la vraie connaissance de Dieu, la médiatrice entre Dieu et les hommes.

Par elle, l’âme s’élève vers le ciel et embrasse Dieu dans une étreinte inexprimable ; assoiffée du lait divin, comme un nourrisson, elle crie avec larmes, vers sa mère. Elle exprime ses volontés profondes et elle reçoit des présents qui dépassent toute la nature visible.

Car la prière se présente comme une puissante ambassadrice, elle réjouit, elle apaise l’âme.

Lorsque je parle de prière ne t’imagine pas qu’il s’agisse de paroles.

Elle est un élan vers Dieu, un amour indicible qui ne vient pas des hommes et dont l’Apôtre parle ainsi : « Nous ne savons pas prier comme il faut, mais l’Esprit lui-même intervient pour nous par des cris inexprimables ». Une telle prière, si Dieu en fait la grâce à quelqu’un, est pour lui une richesse inaliénable, un aliment céleste qui rassasie l’âme. Celui qui l’a goûté est saisi par le Seigneur d’un désir éternel, comme d’un feu dévorant qui embrase son cœur.

Lorsque tu la pratiques dans sa pureté originelle, orne ta maison de douceur et d’humilité, illumine-la par la justice ; orne-la de bonnes actions comme d’un revêtement précieux ; décore ta maison, au lieu de pierres de taille et de mosaïques, par la foi et la patience. Au-dessus de tout cela, place la prière au sommet de l’édifice pour porter ta maison à son achèvement. Ainsi tu te prépareras pour le Seigneur comme une demeure parfaite. Tu pourras l’y accueillir comme dans un palais royal et resplendissant, toi qui, par la grâce, le possède déjà dans le temple de ton âme.

Texte tiré de l’office des Lectures du Vendredi après les Cendres

Que le Seigneur accorde à chaque membre du Commando, le don de la prière.

« C’est tout récemment que j’ai compris que la prière considérée comme fin en tant que union à Dieu n’était pas réservée aux saints, mais qu’elle était accessible à toutes les âmes de bonne volonté. Il n’y a pas d’âme chez qui la prière ne soit un besoin fondamental de la nature. Le péché l’atrophie mais l’âme ne cesse pas de souffrir profondément de cet étouffement dont elle travaille toujours comme elle peut à se dégager. Après tout quoi de plus simple que d’exposer naïvement et paisiblement sans aucune activité de nos facultés autres qu’essentielles notre âme à Dieu comme nous exposons notre corps au soleil, et de laisser les Trois Personnes de la Trinité faire en nous cette œuvre et opérer cette demeure qu’elles ne cessent de solliciter ? La vieillesse qui nous dégage de la chair permet au suave visiter d’entrer. »

Paul Claudel (Extrait d’une lettre inédite de 1929)

Père Jean ILBOUDO de la Théotokos,
Société des Jésuites
Octobre 2011