Jésus aime le silence

Nous remarquons une chose étonnante : le Fils de Dieu, Parole du Père, a une grande nouvelle à annoncer aux hommes : pourtant il se présente d’abord comme un petit enfant qui ne peut pas parler. Ensuite, pendant 30 ans, il demeure à Nazareth, caché aux yeux du monde.

« O silence de Nazareth, enseigne-nous le recueillement, l’intériorité… Enseigne-nous le besoin et la valeur des préparations, de l’étude, de la méditation, de la vie personnelle et intérieure ; de la prière que Dieu seul voit dans le secret » (Paul VI).

Ce temps de retraite et de silence prépare sa vie publique. Ensuite Jésus le prolonge en priant et jeûnant pendant 40 jours dans le désert.

Jésus, en tant que Fils de Dieu, est toujours avec son Père et l’Esprit Saint.

Il est en état d’adoration et de prière. Marche, travail, enseignement, guérisons, tout est accompli en union totale à Dieu. Il le connaît, il lui parle comme un enfant parle à son Père. A tout moment, il vit en sa présence. Son cœur et sa pensée sont orientés vers lui. « Je ne suis pas seul, le Père est avec moi » (Jean 16, 32). C’est ce qui explique que des prières jaillissent spontanément au cours de ses conversations ou de ses enseignements.

Pourtant, comme homme, Jésus éprouvait aussi le besoin de prendre des moments uniquement consacrés à la prière. Il se réservait des temps forts particuliers de prière, en dehors de toute activité humaine. Nous le voyons quitter ses occupations, s’arracher au travail de prédication, à l’emprise des foules. Le soir, la nuit ou le matin il s’enfuyait pour prier.

Donc, distinguons « être uni à Dieu » et « prier ».

Jésus prie souvent

Comme tout bon Juif, Jésus était familier de la Bible. Il connaissait par cœur une grande partie de la loi et des prophètes. L’Exode, l’Alliance, la Pâque, le Royaume de Dieu, le péché et le retour à Dieu, tous ces thèmes et bien d’autres étaient l’objet de sa pensée humaine, de sa culture, et, par le fait même, de sa prière.

Il prononce trois fois par jour le « Écoute Israël »… Il prie avant le repas, bénissant Dieu pour la nourriture. Il récite les psaumes.

En plus de ces temps habituels, il lui arrive de prier à n’importe quel moment, au temple, à la synagogue, ou sur les lieux mêmes de sa mission d’enseignement et de guérison. On sent que sa prière est naturelle et spontanée. Elle jaillit de son cœur.

Il prie parfois avec ses apôtres (Luc 9, 18), avec les 72 disciples (Luc 10, 21) ou encore au milieu de la foule (Jean 11, 41).

Sa prière dure parfois un moment très court, parfois un temps long, par exemple pendant les trois heures de l’agonie pendant lesquelles « il répète les mêmes paroles » (Mat. 26, 40-44). Il prie tantôt le matin, longtemps avant le jour (Marc1, 33), tantôt le soir (Luc 5, 16), parfois même la nuit entière (6, 12), ou les trois quarts de la nuit (Mat. 14, 23-25). Il prie pendant quarante jours au désert (Mat. 4, 2).

Il a une préférence pour les endroits où il peut jouir d’une vraie solitude : à l’écart (Luc 9, 18), dans les lieux déserts (Luc 5, 16), dans la montagne (Luc 6, 12). Il a aussi ses lieux habituels, comme le mont des Oliviers (Luc 22, 39).

Nous pouvons remarquer que son corps participe à la prière : il élève les yeux au ciel avant la multiplication des pains (Marc 6, 41) et après la Cène (Jean 17), à la résurrection de Lazare (Jean 11, 41). Il prend dans ses mains les pains et les poissons. Il est debout (Jean 7,37), à genoux (Luc 22, 41) ou prosterné jusqu’à terre. (Mat. 26, 39).

Cependant Jésus ne prie pas tout le temps. Il fait aussi autre chose. Dans l’Evangile la prière est une activité spéciale. A d’autres moments, il enseigne, il marche, il mange, il parle, il guérit les malades… il dort.

On voit Jésus entrer en prière. Il quitte les gens pour aller prier

(Luc 5, 16). A d’autres moments, il sort de sa prière pour aller vers les hommes (Marc 1,38).

Bref, sa vie est tissée de prière. Ses disciples en sont étonnés et lui disent : « Seigneur, apprends-nous à prier ». (Luc 11, 1)

Remarquons que Jésus, qui était habituellement uni à Dieu, prenait quand même du temps pour prier. Donc distinguons deux choses : être uni à Dieu au long de la journée et prier.

Est-ce que je me réserve du temps pour la prière dans chacune de mes journées, de mes semaines ?

Jésus prie particulièrement dans les moments importants.

Les Évangiles le montrent en prière surtout dans les moments qui vont marquer sa vie. Il prie :

- Au début de son ministère ;il demeure au désert pendant 40 jours, jeûnant et priant.

- Aussitôt après, c’est le baptême où on le voit prier (Luc 3, 21).

- Avant le choix des 12 Apôtres (Luc 6, 12)

- Après la multiplication des pains (Mat 14, 23).

- Avant d’établir Pierre chef du collège apostolique (Luc 9, 18 – Mat.16, 18).

- Il prie au moment de la Transfiguration (Luc 9, 28-29).

- Avant d’enseigner le Notre Père (Luc 11)

- Au moment de la Résurrection de Lazare (Jean 11, 41).

- Au cours du dernier repas (Jean 17).

- Au moment de l’agonie (Luc 22, 34-46).

- Enfin sur la Croix : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mat. 27, 46) ; « Père, entre tes mains, je remets mon esprit » (Luc 23, 46).

Ce qu’est la prière de Jésus

1) C’est une prière de Fils. Presque toutes ses prières commencent par « PÈRE ». Quand il est seul, il dit « ABBA » qui est le terme familier des enfants (Marc 17, 36). Ce mot exprime un poids infini de confiance et d’amour. Jésus reconnaît qu’il reçoit la vie de son Père du ciel et que ce Père l’aime : « Tu es mon Fils bien-aimé » (Marc 1, 11 et Mat. 17, 5).

2) C’est une prière d’amour. « Je dis ce que le Père m’a enseigné » (Jean 8, 28). "Je ne cherche pas ma volonté mais la volonté de celui qui m'a envoyé" (Jean 5,30 ; 4, 34 ; 6, 38 ; 8, 28-29 ; He 10, 9). Il obéit à son Père jusqu’au bout : « Non pas ce que je veux, mais ce que tu veux » (Marc 14, 36).

3) C’est une prière d’adoration et de louange : «Nous adorons ce que nous connaissons » (Jean 4, 22). « Je te loue, Père » (Luc 10 ,21). « Je te rends grâce » (Jean 11, 41) Jésus ne peut pas retenir l’immense joie qui le remplit parce qu’il vit sous l’inspiration de l’Esprit Saint.

4) C’est une prière de demande et d’intercession : Jésus prie pour Pierre (Luc 22, 32), pour ceux qui croiront en Lui (Jean 17, 21). Jésus a prié pour chacun de nous. Il plaide même pour les malheureux qui le condamnent : « Pardonne-leur » (Luc 23, 34).

Il supplie pour lui-même, dans un cri de détresse (He 5,7) « Père, sauve-moi de cette heure » (Jean 12, 27). « Ecarte de moi cette coupe » (Marc 14, 36-39), « Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mat. 27, 46).

5) Il offre sa vie : « Ceci est mon corps livré pour vous » (Luc 22, 19-20). « Entre tes mains, je remets mon esprit » (Luc 23, 46).

Parce que Jésus aime infiniment son Père et parce qu’il apporte le salut aux hommes, sa prière est tout à fait nouvelle. Elle est la seule vraie, la seule valable.

Jésus est le « modèle unique » (Charles de Foucauld).

Notre prière doit essayer de ressembler à la sienne.

 

Abbé Yves JAUSIONS
Diocèse de Rennes, FRANCE
Dans : Oraison sans frontières, 2006.

Suivez-nous sur Facebook