Chers frères et sœurs,

Fils et filles de l’Église Famille de Dieu à Ouagadougou, vous qui, comme Marie sur les chemins montagneux de la Judée, avez parcouru des distances ou surmonté les incommodités de la saison des pluies, des mauvaises routes pour être là ce matin, en cette fête de l’Assomption de notre Bienheureuse Mère du Ciel, que la paix de notre Seigneur Jésus-Christ soit toujours avec vous !

I. L’Assomption, glorification de la Vierge Marie

Le mystère de l’Assomption de Marie est un dogme qui a été proclamé par le Pape Pie XII le 1er novembre 1950. Ainsi, l’Assomption est une fête qui célèbre la glorification de la Vierge Marie au terme de sa vie terrestre. La foi de l’Église enseigne en effet que Marie, la Vierge Immaculée, au terme de sa vie terrestre, a été élevée, « avec son corps et son âme » à la gloire du ciel auprès de son divin Fils. Comme l’épisode de la Visitation (Lc 1, 39-56), Marie est l’Arche de la Nouvelle Alliance qui traverse cette fois-ci le ciel, en direction de Celui qu’elle a jadis porté dans son sein, nourri de son lait et accompagné tout au long de son ministère.

Choisie par Dieu et comblée de grâce dès les premiers instants de sa conception, associée de manière étroite au mystère et à la mission de son divin Fils, Marie est associée aussi de manière spéciale à son destin de gloire. C’est ce mystère que l’Église célèbre aujourd’hui. Elle souligne qu’en Marie, aussi bien au début qu’au terme de sa vie, le mystère pascal a donné toute sa mesure et a produit tous ses fruits. Mais si l’Assomption célèbre la glorification de Marie, elle nous invite par ailleurs à contempler dans ce mystère notre propre destin.

II. La fête de l’Assomption, un appel à la foi et à la joie

Comme le Rappelle le Concile Vatican II, de la même manière que Marie représente et inaugure l’Église sur cette terre, en attendant la venue du jour du Seigneur, elle représente et inaugure aussi l’Église en son achèvement dans le siècle futur (LG 68). Elle est à juste titre considérée comme l’icône eschatologique de l’Église.

En d’autres termes, Marie est l'étoile resplendissante qui annonce et anticipe notre futur ; elle nous donne de voir la condition définitive à laquelle notre Dieu, riche en miséricorde, nous appelle. Elle est la Stella maris, comme le rappelle la tradition, c’est-à-dire l’Étoile de la mer qui nous indique la direction et nous oriente dans notre marche vers la maison du Père.

a) Appel à la foi

Alors que nous célébrons cette grande fête de l’entrée de Marie dans la gloire du ciel, la Parole de Dieu nous invite à faire nôtre son adhésion sans réserve à la volonté de Dieu à travers son « oui » jamais repris qui nous livre à la fécondité du mystère pascal.

Si la glorification de Marie est un privilège qui illustre l’incommensurable et prévenante générosité de Dieu, que Marie chante par ailleurs dans son Magnificat, elle est aussi le fruit de son adhésion totale à la Parole de Dieu. C’est l’éloge de cette disponibilité de Marie que fait l’Esprit Saint par la bouche d’Élisabeth. Dans son dialogue avec elle en effet, Élisabeth chante la foi de celle qui « a cru à l’accomplissement des paroles des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur » (Lc 1, 45).

Croire en Jésus, s’attacher à Lui de tout notre être, voilà l’attitude qui permet au mystère pascal de déployer toute sa fécondité de salut en nous. Marie nous invite à cette audace de croire que la puissance de la Résurrection du Christ peut agir aussi bien en nous qu’autour de nous et faire de nous des hommes et des femmes vraiment nouveaux, capables de pardon et de miséricorde. La fête de l’Assomption nous invite plus précisément à nous livrer sans réserve à l’extraordinaire fécondité du mystère pascal en accueillant dans nos vies, comme Marie, la victoire de son Fils sur le mal. C’est pour cela que la fête de l’Assomption est aussi un appel à cette joie que seule peut donner la foi.

b) Appel à la joie

Frères et sœurs, la fête de l’Assomption est marquée aussi par cet appel à la joie qui explose dans le dialogue entre Marie et Élisabeth et surtout dans le Magnificat qui révèle l’état d’âme de Marie. C’est une joie qui emporte Marie dans toutes les dimensions de son être. Marie chante le Magnificat alors qu’elle venait à peine de recevoir l’annonce de l’Ange, mais elle peut exploser de joie parce qu’elle croit ; elle croit que sa vie et son destin sont entre les mains de ce Dieu qui l’aime.

La fête de l’Assomption nous invite ainsi à cette joie. Et mieux, à travers le Cantique et l’attitude de Marie, elle nous signale que la vraie joie n’est pas le résultat de tous les problèmes résolus, mais le fruit de cette confiance absolue et l’abandon total en Dieu. Dieu nous aime et cet amour manifesté en Jésus, et donné dans sa passion-mort-résurrection trouve son inimaginable expression et sa parfaite réalisation dans la personne et le destin de la Vierge Marie. Son Assomption au ciel, corps et âme, est pour nous un gage qui doit entretenir en nous cette flamme de l’espérance que rien ne peut venir éteindre et ce courant de vie et de générosité que pas les montagnes ne peuvent arrêter, que rien en ce monde ne saurait arrêter.

III. Assomption, appel à être des reflets de la miséricorde de Dieu

Frères et sœurs, en célébrant la fête de l’Assomption, nous célébrons la Vierge Marie comme authentique et digne Temple humain de la miséricorde divine au sein du monde. Et cela constitue un message d’espérance et un défi pour nous, chrétiens du Burkina Faso, chrétiens d’Afrique et du monde entier.

L’existence humaine de chacun de nous, de nos familles ou de nos nations constitue des histoires d’amour, de grâce de Dieu et de son cœur. Comme la Vierge Marie et avec elle, nous devons chanter notre Magnificat. « Le Puissant fit pour moi des merveilles, saint est son Nom! Sa miséricorde s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent ». Nous sommes souvent prompts à voir « la bouteille à moitié vide », c’est-à-dire toute ce qui ne va pas, les difficultés, les lacunes… chez nous et surtout chez les autres…

À l’école de Marie, apprenons à voir le positif en nous – et surtout chez les autres- et exultons de joie et d’action de grâce. Cela suppose au préalable qu’il nous faille ouvrir les yeux pour voir la réalité. En cette Année jubilaire de la Miséricorde divine, nous sommes invités à ouvrir les yeux et les cœurs pour voir et être des instruments de miséricorde de Dieu envers les pauvres, les petits, les malades, les prisonniers, tous ceux qui souffrent physiquement ou moralement. À l’instar de la Vierge Marie face à sa cousine Élisabeth, nous adopterons « un style de vie, dont le centre de gravité n’est pas nous-mêmes, mais les autres » (Pape François). C’est dire que nous sommes tous invités à nous poser la question « Qui est mon prochain » à aider à aimer… Comme nous le recommande le Pape François, « dans la logique de l’Évangile, nous ne devons pas cataloguer les autres pour décider qui est mon prochain et qui ne l’est pas »; il dépend de chacun de nous, d’être ou de ne pas être le prochain de la personne que je rencontre et qui a besoin de mon aide, même si elle n’est pas de ma parenté, de mon ethnie, de ma religion…

La Vierge Marie a manifesté à Élisabeth une attention et une générosité affective et effective. Demandons au Seigneur, par Marie, d’être de « bons sanctuaires » les uns pour les autres. Car c’est seulement par les bonnes œuvres corporelles et spirituelles que notre foi germera et portera de bons fruits pour une société plus réconciliée dans la justice et la paix, un monde plus digne de Dieu et des hommes.

Puisse la célébration eucharistique de ce jour nous procurer un cœur nouveau et un esprit nouveau pour vivre une vie chrétienne plus authentique, celle qui nous prépare à partager la gloire de la Vierge Marie et de tous les saints dans les siècles des siècles! Amen!

+ Philippe Cardinal OUEDRAOGO,
Archevêque de Ouagadougou